Festival

La danse est au cœur de la vie sociale

 Organisé le 24 juillet dans le cadre du festival Bia So Mengong, un séminaire culturel a permis d'analyser l'impact de cette discipline dans le quotidien des populations.
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La deuxième édition du festival Bia So Mengong bat encore son plein du côté  de Mengong à 30km d’Ebolowa. Le 24 juillet, une rencontre a réuni trois experts à la mairie de la commune autour du thème  » Danses patrimoniales et us et coutumes bulu: étude des impacts et implications sociales ». Devant une assistance d’une quarantaine de personnes et sous la modération du Dr Kampoer Kampoer, chef de service  à la direction du Livre au ministère des Arts et de la culture, le  Pr François Bingono Bingono, anthropologue, Sylviane Messina Efouba, chorégraphe et  Joseph Owona Ntsama, critique d’art ont débattu avec animation du rôle du chant et de la danse dans la société Bulu.

D’entrée de jeu, Joseph Owona Ntsama a indiqué que les danses patrimoniales ne doivent pas être vues uniquement sur le prisme du folklore. Elles sont l’expression du mode de vie de ceux qui les pratiquent. Mieux, elles sont le témoignage d’un patrimoine culturel immatériel riche et vivant. «Parler de danses traditionnelles fait archaïque du coup on parle de danses patrimoniales. On doit arrêter de croire que ce qui se passe au pays est toujours traditionnel ou s’apparente à du folklore car le folklore est déjà répandu même hors du pays», a-t-il expliqué.

Pour François Bingono Bingono, la danse n’est pas un élément du hasard. Elle est une évidence car elle joue plusieurs rôles au sein des sociétés Fang-beti-Bulu. Au-delà de sa fonction ludique, elle est un puissant moyen de communication.

«Communiquer, c’est échanger des informations. Quand un enfant vient au monde,  quand il y’a mariage, quand il y a enterrement…, on danse. Quel que soit le moment de la vie,  on chante et danse. L’Afrique est un contexte de civilisation où on chante sa douleur, on danse ses malheurs et célèbre sa joie. En aucun cas la danse,  le chant et la parole poétique ne doivent être dissociés», a précisé l’anthropologue. Allant dans le même sens, Joseph Owona Ntsama a aussi précisé que chaque peuple à sa façon de danser. Il s’agit donc d’un patrimoine à sauvegarder. Mieux un héritage qui nous a été légué. « C’est ce que personne ne peut nous prendre,  ce qui nous appartient et que personne  ne peut revendiquer», a-t-il précisé.

 

Mevungu, la danse rituelle

Au sein des communautés, les danses patrimoniales ont une fonction réparatrice en intervenant pour le règlement des litiges. Selon François Bingono Bingono, « la danse permet d’aplanir et de consacrer les différents à l’évidence. La danse n’est pas quelque chose de banal», relève le journaliste avant d’ajouter avec précision, le contexte de son application. «Quand il y a des divisions même dans certaines familles, pour que tout ceci se termine, on se retrouve en train de danser l’Essani dans un rituel qui sera lancé. Et  l’Essani n’est pas une danse de joie mais une espèce de rituel qui conjure un mauvais sort», explique François Bingono Bingono.

Les danses patrimoniales permettent également de mesurer la place des femmes dans la vie sociale d’un village. Chez les peuples de la forêt, on ne peut pas parler de chant ou de danse sans évoquer les femmes.  Le Mevungu, danse rituelle exclusivement réservée aux femmes, l’Emvala, la  danse rythmique des jeunes filles en sont  un parfait exemple. Autrefois, les femmes Bulu utilisaient la danse en position assise (Mengane) pour exprimer leur peine.

Aujourd’hui, plusieurs danseuses continuent de perpétuer la flamme. Danseuse, chorégraphe et surtout promotrice culturelle, Sylviane Messina Efouba épouse  Yakan en est le parfait exemple.   La danse a été et un appel auquel elle n’a pas résisté «Enfant, j’entrais en transe en écoutant le son du tam-tam. A côté d’une grande sœur  médecin, d’un petit frère qui va devenir ingénieur, d’une petite sœur logisticienne, ça n’a pas été facile pour moi de convaincre mes parents de me laisser danser», révèle l’artiste.

Mais près 19 ans plus tard: « Je pense être un exemple vivant de la danse auprès de mes proches,  vu que je vis de cette discipline et des spectacles que je fais avec ma compagnie du Prix Découverte Danse du Goethe Institut en 2017 ».

Promoteur du Bia Si Mengong, Steve-Felix Belinga a présenté le contexte d’organisation du séminaire. « Le festival est la célébration art et culture parmi les cinq axes que Belinga foundation soutient à savoir art,  santé,  culture,  éducation et développement durable. On ne saurait parler d’art et culture si on ne s’interroge pas sur la nature de cette culture que nous voulons défendre et voulons émergente. Les danses sont un thème fondamental dans la culture», a-t-il expliqué avant de conclure que : «Quand on parle de danses africaines,  on a l’impression qu’on danse parce qu’on est fainéant ou paresseux mais pourtant on le fait pour protéger les traditions. Ces danses sont toutes aussi importantes que la tradition orale».

Elsa Kane

Author: Elsa Kane

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