Art

Ikama, la vitrine de l’artisanat africain en Suisse 

Tenue d'une main de maître par Josiane Lemofouet, dynamique camerounaise, la boutique propose des objets faits main que la promotrice prend plaisir à acheter elle-même auprès des coopératives. Le projet met l’accent sur le commerce équitable à travers le contact direct avec les artisans.
WhatsApp Image 2023-07-06 à 01.20.43

 

Ikama est située sur la rue du Petit chêne 36 à Lausanne. Un endroit stratégique à 5 minutes de la gare. Avec ses murs blancs, ses étagères remplies avec soin et recherche, l’ambiance y est chaleureuse. Comme dans la caverne d’Ali Baba, on y trouve plusieurs trésors d’Afrique. Du sirop du curcuma ou de fleurs d’hibiscus made in Cameroun, de la vannerie venue tout droit du Kenya, des sculptures du Burundi ou encore du textile de Zambie. 

En ce mois de juin, début de l’été, Lausanne est plein de touristes et de  vacanciers. Ikama ne désemplit pas. Cheveux en coupe afro et bijoux en perles d’Afrique du Sud, Josiane Lemofouet accueille ses clients avec amabilité et délicatesse. De nature spontanée et joyeuse, la promotrice d’Ikama met un point d’honneur à ce que ses clients se sentent à l’aise et accompagnés durant leurs achats. On peut passer des minutes entre les étagères à choisir ses articles, poser des tas de questions sur l’origine et la conception d’un produit. Josiane Lemofouet assure le service client avec tact, humour et passion. Normal, Ikama n’est pas le fruit du hasard. Mais la réalisation d’une ambition. Celle de mettre en lumière  le magnifique travail des artisans talentueux. 

«J’ai toujours aimé l’artisanat, particulièrement ce qui est fait à la main. Parce que cela demande en plus du talent, beaucoup de créativité et de patience », dit l’entrepreneure. Forte de cet engouement, elle a donné une dimension militante à son travail. Josiane Lemofouet regrette en effet que l’art africain soit parfois considéré par certains comme un art de seconde zone. « Tout le monde le connaît comme quelque chose de bon marché et pas qualitatif que les marchands dans la rue vendent par terre et c’est cette vision que je tiens à changer », déclare-t-elle. 

Ancienne employée dans le commerce de luxe, elle a voulu donner une autre vision de l’art africain. Surtout qu’en Suisse l’art africain dit-elle, celui-ci n’est pas assez représenté. «Au Cameroun comme dans beaucoup d’autres pays, on n’a pas conscience de la valeur de notre artisanat. Je veux que les gens regardent les produits artisanaux comme  ils regardent un sac à main de luxe. Je pense qu’on peut regarder un panier fait main par un artisan et avoir des réactions positives ».

 L’aventure Ikama a débuté en  2019. Josiane Lemofouet est encore salariée et consacre son temps libre à son projet. « C’est fin 2019, peu de temps avant la Covid-19 que je décide de monter Ikama. J’ai commencé par un projet E-commerce avec un site parce  que j’étais en activité professionnelle. La Covid-19 m’a poussé à aller plus loin. Étant à temps partiel dans mon activité professionnelle, j’ai décidé de quitter de l’étape du site internet pour le marché en allant promouvoir les produits directement auprès des consommateurs dans différentes villes en Suisse depuis lors jusqu’à présent ». Ses  débuts sont laborieux mais exaltants. « Quand je faisais uniquement les marchés, le travail était très saisonnier parce que pendant l’hiver, à partir d’octobre-novembre, je n’avais presque plus de marché. J’attendais jusqu’en avril pour recommencer. Il y’a des marchés d’hiver mais je ne supportais pas de travailler dehors en cette période donc je travaillais 7 mois l’année », révèle  l’entrepreneure. 

Pour s’assurer de la qualité  des articles et surtout mieux vendre une autre image de l’artisanat africain en Suisse, Josiane Lemofouet démarche elle-même les artisans en se rendant sur place en Afrique. Elle parcourt les foires et descend dans les ateliers. «Je travaille directement avec les artisans. « J’ai fait ce choix pour une question de traçabilité du produit. C’est-à-dire d’où viennent les produits ? Comment ils sont faits car c’est fondamental. Cela me permet aussi de m’assurer que l’argent que je verse va réellement à l’artisan qui fait le produit. En passant par un intermédiaire, je n’aurai pas la garantie que tout cela est respecté », souligne Josiane Lemofouet.

 

Dénicheuse de Trésors

 

Cela lui permet de maîtriser les conditions de production, les petites et grandes histoires derrière chaque objet. « Je présente l’œuvre et j’explique au client d’où ça vient vu que je suis directement en contact avec les artisans, avec des coopératives ou des fondations de femmes qui promeuvent leur savoir-faire. Grâce à ce contact direct avec les artisans, j’ai donné envie à mes clients de découvrir le fait-main. Ici en Europe, les articles faits à la main sont de plus en plus rares puisque tout est industrialisé et le fait de revenir à des choses  plus basiques et fondamentales est très important pour certains clients. J’ai par la suite démissionné de mon poste pour pouvoir consacrer complètement à Ikama », révèle avec fierté la promotrice très engagée dans le commerce éthique, écologique et responsable.

En Suisse, les challenges ne manquent pas pour les entrepreneurs africains qui doivent s’intégrer  à un contexte nouveau. « La difficulté première n’est pas directement liée au produit mais plutôt au coût de la vie. Certes le pouvoir d’achat est élevé mais le coût de la vie l’est encore plus ».

Il faut aussi composer en tenant compte des exigences, des goûts et des couleurs  du client. « Travailler directement avec les artisans permet d’assurer la personnalisation du produit. Je vis dans un environnement où la clientèle n’est pas africaine. Donc en travaillant directement avec les artisans, cela me permet de passer les commandes à la demande en respectant les couleurs, les tailles et les formats souhaités par le client ».

Aujourd’hui, Ikama construit patiemment son label à la grande satisfaction de son énergique directrice. « La plupart du temps, quand les gens découvrent la boutique, il y’a un effet de surprise et de curiosité. On n’a pas de magasins dans la ville et en Suisse, il y a quelques boutiques qui font des produits alimentaires, cosmétiques et un peu d’artisanat mais pas forcément de l’artisanat de qualité et encore moins diversifié. Chaque africain propose l’artisanat de son pays.  Or comme vous avez pu le constater, nos articles viennent de toute l’Afrique ( Madagascar, Swaziland, Mali, Sénégal, Ghana). C’est en 2022 que Josiane a pu ouvrir cette boutique. Son site internet est toujours disponible. « Depuis  l’ouverture de cette boutique en septembre 2022, la clientèle est plus fidèle et ils savent où me trouver », dit-elle pas peu fière du chemin parcouru et de son noble objectif de valoriser le savoir-faire des artisans africain en Suisse.

De retour de Lausanne, Suisse

Elsa Kane

Author: Elsa Kane

Commenter

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs requis sont indiqués *


A Propos

Le jour est un quotidien d’informations générales fondé en 2007.
« Faire voir, faire savoir, faire parler, faire comprendre » est le leitmotiv de ce journal qui insiste sur une information vérifiée, sourcée et documentée. Une large place est donnée à l’information économique et sportive. Un soin particulier est accordé aux portraits et le but final est d’apporter sa « patte » à l’écriture de « l’odyssée camerounaise ».

NOUS CONTACTER

NOUS APPELER



Newsletter

Inscrivez-vous à notre newsletter et recevez des infos exclusives.



    Catégories


    Elsa Kane
    Author: Elsa Kane