Samuel Eto’o, le président de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot), semble avoir des bras trop longs, de jour comme de nuit, comme il affirmait au détours dune réunion du Comité exécutif, en février 2022 à Limbe. Sinon, comment comprendre qu’avec tant de plaintes suite à ses multiples frasques à la tête de la Fécafoot, la Fifa et la Confédération africaine de football (Caf) sont restées silencieuses ? Pourtant : « Le baiser forcé de M. Luis Rubiales, le président de la Fédération Espagnole de Football, à la joueuse Jenni Hermoso, le 20 août 2023 à Sydney après la finale de la Coupe du Monde Féminine de la FIFA, lui aura finalement été fatal. Poussé par la pression populaire, les politiques, la FIFA, des acteurs du football espagnol et les médias, le Président de la Fédération Espagnole de Football na pas eu d’autre choix que de jeter l’éponge. Avant sa démission, la FIFA lui avait infligé dès le 26 août 2023, à titre conservatoire, une suspension de 90 jours en attendant l’aboutissement de la procédure disciplinaire ouverte contre lui », font remarquer neuf acteurs du football camerounais, dans une lettre ouverte adressée à Gianni Infantino, le président de la Fifa et à celui de la Caf Patrice Motsepe, le 25 septembre dernier.
La célérité avec laquelle la Fifa a traité la cas Luis Rubiales a été saluée et lon a pensé à une application équitable de la loi dans cette instance du football mondial. « Lon est bien surpris quelle (la Fifa, ndlr) reste silencieuse pour des cas similaires ou peut-être plus graves, enregistrés dans d’autres fédérations, notamment la Fédération Camerounaise de Football (Fécafoot) », s’étonnent le général Pierre Semengue, président de la Ligue de football professionnel du Cameroun (Lfpc), Faustin Domkeu, 1er vice-président de ladite Ligue, Henry Njalla Quan Junior, 4ème vice-président démissionnaire de la Fécafoot, Joseph Feutcheu, président de Djiko Fc et membre démissionnaire du Comité exécutif de la Fécafoot, Henri Claude Balla Ongolo, président de l’Association des clubs amateurs du Cameroun (Acfac), Abdouraman Hamadou Babba, président d’Etoile Filante de Garoua, Pierre Ndjili Ndengue, instructeur Caf et ancien sélectionneur de l’équipe nationale U 23 du Cameroun, Guibai Gatama, membre du Comité exécutif, et François Kouedem, président de la ligue régionale de football de l’Ouest.
Chronologie des faits accablants Samuel Eto’o
Ils énumèrent explication et précisions à l’appui, les « scandales » du président de la Fécafoot, de façon chronologique. « Le 20 juin 2022, après avoir reconnu avoir fraudé la somme de 3,8 millions d’euros au Trésor public espagnol, M. Samuel Eto’o Fils, le président de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot), a été condamné à la peine devenue définitive de 22 mois de prison ferme, assortie dun sursis de cinq ans. Suite à cette condamnation, malgré les dispositions très claires de l’article 47 des Statuts de la Fécafoot, M. Samuel Eto’o a refusé de quitter son poste et continue de s’imposer illégalement à la présidence de la Fécafoot », écrivent-ils. De plus : « Le 5 décembre 2022, à la fin du match de huitième de finale de la Coupe du Monde Qatar 2022 qui a opposé le Brésil à la Corée du Sud, M. Samuel Eto’o Fils, Président de la Fécafoot, sen est violemment pris au jeune youtubeur algérien Sadouni SM sur le parvis du stade 974, lui assénant des coups de pied et des coups de poing. Cette scène a été filmée et largement diffusée dans le monde entier. En date du 26 mai 2023, en flagrante violation des dispositions de l’article 27 du Code d’éthique de la Fifa, M. Samuel Eto’o Fils, le président de la Fécafoot, a signé un contrat de sponsoring à titre personnel avec l’entreprise de paris sportifs 1XBET ». Plus grave : « dans un entretien téléphonique datant du début du mois de janvier 2023 et révélé le 18 juillet 2023, M. Samuel Eto’o Fils, Président de la Fécafoot, a tenu des propos montrant clairement qu’il est au centre dune entreprise de manipulation des résultats des matchs organisés par la FECAFOOT, une infraction sévèrement punie par l’article 20 du Code Disciplinaire de la Fifa et par l’article 154 du Code Disciplinaire de la Caf relatif à l’atteinte à l’incertitude des résultats des matches de football ».
Le 9 août 2023, la Caf annonçait louverture dune enquête à l’encontre de Samuel Eto’o pour « comportement inapproprié », jugeant les allégations portées à son attention « à première vue sérieuses ». « Mais depuis lors, aucune suite na été accordée à ce dossier pourtant au cœur même des enjeux du football que sont l’intégrité, l’éthique et l’équité sportives. Par contre, pas un seul mot du côté de la Fifa, malgré les nombreuses plaintes et relances des acteurs du football camerounais », s’étonnent-ils encore. En rappelant comment le président de la Fifa continue de s’afficher en public avec Samuel Eto’o, alors qu’il n’aurait pas fait la même chose avec lex-président de la Fédération espagnole. Tout comme Patrice Motsepe, devenu silencieux, alors qu’il avait fait du respect des valeurs éthique son cheval de bataille à la Caf.
« Gestion à deux vitesses des situations quasi similaires »
« La triste image que renvoie cette gestion à deux vitesses des situations quasi similaires est que l’Afrique reste une sorte d’enclave où on peut prendre des libertés avec l’éthique et l’exemplarité que doivent incarner les dirigeants sportifs. Imagine-t-on seulement la Fifa, l’UEFA, silencieuses alors qu’un président dune fédération européenne de football est soupçonné de trucage de matchs avec enregistrements audio à l’appui ? Imagine-t-on seulement la Fifa et l’UEFA silencieuses alors qu’un président dune fédération européenne de football a signé à titre personnel un contrat d’ambassadeur avec un opérateur de paris sportifs ? », s’interrogent les expéditeurs de la lettre ouverte. Avant de lâcher : « Les fédérations africaines de football, pour des raisons électoralistes, doivent cesser d’être des repaires de toutes sortes dindividus sans foi ni loi, qui profitent de la protection de la Caf et de la Fifa. L’obligation d’exemplarité doit aussi concerner les dirigeants sportifs africains et il appartient autant à la Fifa qu’à la Caf d’y veiller, sans faiblesse, sans discrimination, ni faux fuyants ». Le monde entier va alors lire cette « Lettre ouverte » pour se rendre compte de ce qui se passe au Cameroun, avec la Fécafoot, en complicité avec les dirigeants de la Fifa et de la Caf.