L’ancien vice-président du parti de la balance a été élu avec 63 % des voix dans un contexte de tension extrême. Il remplace ainsi John Fru Ndi, décédé le 12 juin 2023 des suites de maladie.
Joshua Osih est le nouveau chairman du Social democratic front (Sdf). Le désormais ex 1er vice-président prend les rênes du parti pour les 5 prochaines années. En effet, il a battu les deux autres candidats au bout d’une élection électrique le 28 octobre dernier au palais des sports de Yaoundé. Il s’en tire avec 63% des voix ; suivi de Shewa Jestel et Goddon Zama avec respectivement 23% et 14% pour 1565 votants. Les résultats de l’élection sont tombés au petit matin du dimanche 29 octobre 2023 dans un palais des sports bouillonnant. Pour le vainqueur : « Le Sdf est un parti sérieux ; il a besoin d’un leader sérieux ».
Un congrès sous haute tension
Ce 10ème congrès du Social Democratic Front (Sdf) s’est tenu dans un contexte mêlé de tensions et de bras de fer car les trois candidats en lice se regardaient en chiens de faïence. Pour preuve, un pistolet a fait irruption dans la salle contre toute attente. « Voilà quelqu’un qui sort l’arme. Tire on voit. Tire. Vous aimez entendre que vous avez le pouvoir vas-y tire », tonne un délégué. L’accrochage avec le garde du corps de Shewa Jestel a ameuté l’assistance. L’homme avec l’arme n’a pas été formellement identifié. Mais selon un délégué qui suivait l’action de près, il s’agissait du garde de corps de Joshua Osih : « Il y a eu accrochage. Le garde de corps de Shewa aurait mal parlé à Joshua. Son garde de corps lui a dit de ne pas ainsi parler à son patron. La tension est montée d’un cran et le pistolet est sorti. La guerre d’intimidation », nous confie-t-il.
Après la lecture des rapports des différentes commissions, le passage à l’élection était une autre paire de manche. La bataille des « charters » était au rendez-vous. « C’est vraiment désolant. J’ai vu beaucoup de jeunes venus voter. Pourtant, ils ne sont même pas du Sdf. C’est une grosse honte pour le Sdf. Joshua doit laisser. Il a géré ces dernières années on a vu. Il n’est pas à la hauteur. A cause de lui, il y a des fissures et des dissensions à nulles autres pareilles dans le parti », tonne un délégué en colère. Sauf qu’en face, des chants à la gloire de l’honorable Osih inondent le palais des sports : « Votez Joshua Osih, le meilleur choix. Les autres n’ont pas le profil nécessaire, votez Joshua le meilleur choix », scandent certains délégués de la région de l’Est. Face à un cafouillage et ce qu’un délégué a qualifié de « bourrage des urnes », le candidat Shewa Jestel a contraint la commission électorale à arrêter le processus. « Ils ont démarré les élections sans nos représentants. Ils envoient des gens voter sans carte d’identité. On a offert des cartes de membre du parti de 500 Fcfa aux étudiants en y écrivant leurs noms. Avec cela, on peut même voter pour quelqu’un qui est encore en salle. C’est pour cette raison que j’ai arrêté la procédure. Nous sommes infiltrés par notre adversaire le Rdpc qui veut prendre notre parti en otage ».
Shewa Jestel dénonce des irrégularités
D’un bout à l’autre, on a failli en venir aux coups de poings dans une salle pourtant parsemée des effigies du charismatique Ni John Fru Ndi : « C’est une grosse honte de voir le Sdf projeter de telles images. Notre père, John Fru Ndi, ne doit pas être content de ce spectacle désolant. Il doit se retourner plusieurs fois dans sa tombe. Ceci ne l’honore pas, encore moins le parti. Il faut dire que le vrai concurrent de Osih était Nintcheu. Hélas », pleure un délégué. Après de longues heures de négociations, les votes ont repris avec toujours la tension dans les airs. Il fallait être téméraire pour introduire son bulletin dans les urnes car les candidats s’épiaient sans cesse.
Le G27+ tourne le dos au Sdf ?
Avant le début des élections, le jour a échangé avec un membre du groupe des « frondeurs » du parti. Le retour à la maison reposait sur la défaite de Joshua Osih. « Si un autre candidat gagne, il est clair qu’il fera un discours de réconciliation et va inviter le G27+ à revenir au sein du parti ». Cette prophétie n’a pas eu lieu. Nous l’avons rappelé juste après les résultats qui donnent Osih victorieux. « Le G27+ va rester silencieux car sa victoire ne nous sert à rien. S’il perdait, certains rentreraient dans le parti. Nintcheu a déjà son parti et va enrôler sans doute une bonne partie. Certains iront dans d’autres partis politiques alors que d’autres pourront abandonner ». Si certains délégués repartent satisfaits de la tenue, enfin, de ce congrès avec l’élection de Joshua Osih, d’autres n’ont pas caché leur déception dans la mesure où ils souhaitaient voir un nouveau visage diriger cet appareil politique pour les prochaines années.
Lancé le 26 mai 1990 à Bamenda, le Social democratic front (Sdf) traverse une longue secousse ces dernières années. Des dissensions ont créé des frictions internes et des cassures profondes. La dernière élection présidentielle et le double scrutin législatif et municipal ont consacré la mauvaise santé du parti de la balance. Le deuxième chairman de l’histoire de cette formation politique est attendu sur le terrain. « Il a été élu dans un contexte qu’on connait tous. Maintenant, on attend de voir ses actions sur le terrain. Va-t-il réussir à réconcilier la famille divisée. J’espère qu’il va y arriver », commente un délégué de la région du Nord-Ouest.