Processus électoral à la Fécafoot

La Fifa menace, le Gouvernement recule

Les secrétaires généraux de ces instances du football ont signé une correspondance pour imposer la tenue de l’Assemblée générale extraordinaire de ce jour, obligeant l’autorité administrative à revenir sur la décision de son interdiction prise en matinée.
Véron Mosengo Omba

L’on avait cru que le Gouvernement avait pris la résolution de mettre de l’ordre au sein de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) à travers la correspondance du ministre des Sports, le Pr Narcisse Mouelle Kombi du 8 juillet 2021, demandant de surseoir à la tenue de l’Assemblée générale extraordinaire (AGE) qu’elle organise ce jour, 13 juillet 2021 à Yaoundé. Visant cette correspondance, le Sous-préfet de l’arrondissement de Yaoundé II, Mamadi Mahamat, a signé une décision d’interdiction de la tenue de cette AGE hier, 12 juillet 2021 en matinée. Cette décision d’interdiction était motivée par le « non-respect des textes en vigueur ; non-respect de l’esprit des sentences rendues par le Tas et la CCA (Cnosc) induisant l’illégitimité des personnes convoquées à l’AGE du 13 juillet 2021 ; non-respect de ses propres textes par la Fécafoot », ainsi que l’indiquait le Pr Narcisse Mouelle Kombi dans sa correspondance. Une correspondance à la suite de laquelle, la Fécafoot, à travers son 1er vice-président Aboubakar Alim Konaté, s’inscrivait en faux contre les arguments de droit développés par le ministre des Sports. Aboubakar Alim Konaté, annonçait d’ailleurs de faire tenir la correspondance du ministre des Sports à la Fifa et à la Caf. « Le processus en cours est supervisé par la Fifa et la Caf qui seront représentés à l’Assemblée générale du 13 juillet 2021 à Yaoundé. Nous avons dès lors le devoir de leur faire tenir copie de votre correspondance à toutes fins utiles », promettait Alim Konaté.

Et du coup, Fatma Samoura, la secrétaire générale de la Fifa, et Véron Mosengo-Omba, le secrétaire général de la Caf, ont fait une sortie conjointe. Sur un document dont l’entête porte les logos de la Fifa d’un côté et de l’autre, celui de la Caf. Les deux patrons de l’administration de ces instances du football font une interprétation de la sentence du Tas (Tribunal arbitral du sport), telle qu’ils l’avaient déjà fait dans la correspondance du 16 janvier 2021 signée de Fatma Samoura et celle de Véron Mosengo-Omba, à lors Directeur de la Division des associations membres Afrique et Caraïbes de la Fifa, du 19 février 2021. Les deux personnalités se sont accrochées sur les points 233 et 235 de l’exposé des motifs de cette sentence. Pour eux : « le Tas a considéré qu’il appartenait aux organes actuellement en place à la Fécafoot de finaliser dans les meilleurs délais, le processus d’adoption des statuts et des textes réglementaires et nécessaires dans le respect des statuts 2012, avant de procéder à de nouvelles élections ».

Chantage de la Fifa et de la Caf

Bien plus, selon Fatma Samoura et Véron Mosengo-Omba, les raisons avancées par le ministre des Sports et visées par Mamadi Mahamat, ne sauraient être un frein à la tenue de cette AGE. « Nous invitons donc la Fécafoot à poursuivre ses préparatifs organisationnels et demandons aux autorités de bien vouloir la soutenir dans cette démarche », lit-on. Avant de brandir clairement ce que d’aucuns ont appelé le chantage : « Dans l’hypothèse où l’AGE ne serait pas organisée comme prévue et où les textes révisés en collaboration avec la Fifa ne pourraient donc pas être adoptés, nous serions contraints de présenter la situation de la Fécafoot aux organes compétents de la Fifa pour considération et prise de décision ». Ces deux secrétaires généraux vont plus loin, en évoquant, en de termes volés, le fait qu’une sanction de la Fifa entraînerait un retrait de l’organisation de la Can au Cameroun. « Pour la Caf, il est particulièrement regrettable qu’au moment où l’enjeu principal des acteurs du football camerounais devrait être l’organisation d’une Can qui se veut exceptionnelle, que les efforts déployés par la Fécafoot soient annihilés par une affaire déjà scellée par le Tas », soutiennent Fatma Samoura et Véron Mosengo-Omba. Il s’agit là, de ce que certains acteurs du mouvement sportif ont appelé ingérence de la Caf et de la Fifa dans les affaires de la Fécafoot. Violant ainsi les dispositions de leurs propres textes.

La faiblesse de l’Etat

Et du coup, cette lettre dont le destinataire est Benjamin Didier Banlock, le secrétaire général de la Fécafoot, avec pour instruction de transmettre copie aux parties concernées, a eu son effet. Le rétropédalage spectaculaire de Mamadi Mahamat, le Sous-préfet de l’arrondissement de Yaoundé II. Moins de 7h de temps, après la signature de la décision d’interdiction de cette AGE, il a signé une autre décision « rapportant une interdiction de réunion publique », non sans viser la correspondance du 8 juillet 2021 du ministre des Sports. « Les dispositions du récépissé de déclaration réunion publique n°00128/RDRP/JO6-02/BAAJP en date du 09 juillet 2021, autorisant la session de l’AGE restent et demeurent par conséquent valables », écrit l’autorité administrative. Le Sous-préfet venait ainsi de faire machine arrière, désavouant du même coup le ministre des Sports. Le Pr Narcisse Mouelle Kombi, tutelle de toutes les fédérations sportives au Cameroun, garant de l’ordre public sportif, pour qui le respect des textes en vigueur ; de l’esprit des sentences rendues par le Tas du 15 janvier 2021 et la CCA (Cnosc) du 10 juin 2021, induisant la légitimité des personnes convoquées à cette AGE du 13 juillet 2021 ; des propres textes par la Fécafoot, serait cardinal pour la conduite d’un meilleur processus électoral. Dans tous les cas, il s’agit, selon des observateurs, d’un feuilleton à rebondissements, qui n’est pas sur la voie de l’accalmie, au regard de la témérité des acteurs apôtres du respect de la loi et des décisions de justice.

Achille Chountsa    

 

« Poser les bases de la refondation de la Fécafoot »

Parfait Siki. Le chef de département de la communication de la Fécafoot parle de l’ambiance qui y règne après la réception du courrier de la Fifa-Caf.

Comment la Fécafoot a-t-elle accueilli la lettre de la Fifa-Caf et l’autorisation du Sous-préfet pour le déroulement de l’Assemblée générale extraordinaire de ce 13 juillet ?

Nous avons accueilli ces nouvelles avec beaucoup de sérénité, d’humilité et de satisfaction. C’est une Assemblée générale, qui a été projetée et à un moment compromise, va effectivement avoir lieu le jour prévu. Tous les acteurs sont là ; ils sont à Yaoundé. Nous allons poser les bases de la refondation de la Fécafoot au cours de cette Assemblée générale.

Quels sont les acteurs convoqués à cette Assemblée générale extraordinaire ?

Les personnes convoquées à cette assemblée générale sont celles indiquées par la sentence du Tas (Tribunal arbitral du Sport, ndlr), lesquelles ont été invitées à assurer l’intérim.

C’est bien les membres de l’assemblée générale de 2009 ?

Les membres de l’assemblée de 2009 ne sont pas identifiés par cette sentence du Tas comme étant l’institution devant assurer l’intérim. Le Tas a parlé des organes actuellement en place. Donc, ceux issus du processus électoral de 2018. C’est bien ce que la Fifa a encore rappelé ce 12 juillet 2021. Ce débat n’a plus raison d’être. En ce qui nous concerne, il est déjà scellé.

Cette réunion de ce 13 juillet n’est-elle pas un moyen de constituer une autre assemblée générale de la Fécafoot ? Cette assemblée générale n’est-elle pas ex-nihilo ?

On ne part pas ex-nihilo. Nous partons d’un processus électoral qui a été annulé. Mais, le Tas a estimé que les personnes qui avaient été élues au cours de ce processus sont habilitées à poursuivre la réforme des textes et sur cette base, organiser de nouvelles élections.

Le Tas dans sa sentence indique que l’Assemblée générale légitime à la Fécafoot est celle de 2009. Est-ce qu’il n’y a pas problème ?

A aucun endroit de la sentence, le Tas ne dit que l’Assemblée générale légitime est celle de 2009.

Une autre sentence, celle du 10 juin 2021 de la CCA, confirme bien que c’est l’Assemblée générale de 2009 qui est légale. N’y a-t-il pas entorse quelque part ?

A toutes fins utiles, je voudrais vous préciser que la question que vient de connaître la CCA (Chambre de conciliation et d’arbitrage, ndlr) est une affaire qui a déjà été connue par une instance qui lui est supérieure (…)

Propos recueillis par A.C

 

 

« Ce chantage ne peut pas prospérer »

Georges Endjako Améké. Juriste internationaliste, médiateur, le directeur général du cabinet GEA and Partners Consulting, pose un regard sur les enjeux de la correspondance de la Fifa et de la Caf.

La Fifa et la Caf ont fait parvenir une correspondance au Cameroun à la veille d’une Assemblée générale extraordinaire qui, sur la base de celle du ministre des Sports, avait été interdite par l’autorité administrative. Quelle analyse faites-vous de cette situation ?

Je perçois cette affaire comme un imbroglio total dans lequel se trouve le football plongé, non seulement le football camerounais mais le gouvernent de la République du Cameroun, qui démontre par les atermoiements du Sous-préfet de Yaoundé II, une absence de cohésion gouvernementale.  En réalité, l’incurie qui a cours, dans la gestion ou la gérance du football par la Fécafoot qui est délégataire du service public à elle confié par le ministre des Sports, ne peut laisser aucun esprit éclairé et éveillé indifférent. Il a été question pour le ministre des Sports de mettre fin en cette incurie et de rappeler à cette Fécafoot et à ces gens, qui s’arcboutent par tous les moyens au siège de la Fécafoot à revenir aux respect de l’orthodoxie, à respecter leur propre texte, à respecter la réglementation, c’est-à-dire la loi du 11 juillet 2018, relative à la promotion des activités physiques et sportives au Cameroun ; et même l’esprit de la sentence du Tas et des décisions de la justice camerounaise. Car dans cette situation le ministre ne comprends pas pourquoi des gens peuvent recourir à la mise en place de l’Assemblée constituante pour adopter les textes de la Fécafoot en lieu et place d’une Assemblée légalement et légitiment constituée, qui est celle de 2009 confirmée par la sentence du Tas et puis reconfirmée par la sentence de la Cca, parce qu’il faut dire que la compétence de l’Assemblée générale, pour se prononcer sur des questions relatives à l’adoption des textes, au fonctionnement de la Fécafoot ne relève pas d’aujourd’hui. Depuis 2015-2016 avec le Pr Joseph Owona, une espèce s’est déroulée devant la Cca, qui a confirmé la prééminence et la primauté de cette assemblée générale dans le cadre du parachèvement du processus électoral à la tête de la Fécafoot cela n’a fait qu’être confirmée par le Tas. Ce n’est pas le Tas qui crée cette jurisprudence de la Cca sur le Tas aujourd’hui à nouveau. Donc, il est hors de question que les membres de cette Assemblée générale qui ont agi en 2018 sous le magistère de Me Happi, à l’époque président du Comité de normalisation, puissent être aujourd’hui balayé d’un revers de la main par quelques gens, qui refusent de se conformer à l’orthodoxie et à la norme. Il était de bon ton pour le ministre de prendre ses responsabilités et d’ordonner l’arrêt de cette incurie.

Comment appréciez-vous le rétropédalage du Sous-préfet à la suite de la correspondance de la Fifa-Caf ?

Il me semble qu’il n’y a de Sous-préfet que parce qu’il y a une République, qui par ici, est celle du Cameroun. La sous-préfecture est un service déconcentré du ministère de l’Administration territoriale (Minat, ndlr), qui administre le territoire du Cameroun. Lorsqu’un Sous-préfet doit agir il doit le faire conformément aux instructions de sa hiérarchie, qui doit prendre les informations, les nouvelles de son collaborateur, qui est le dépositaire de l’ordre public en matière sportive, des organisations sportives au Cameroun. C’est-à-dire il y aurait eu en amont, une concertation entre le Minat et le Minsep pour savoir quelles sont les suites à donner à cette affaire. Il me semble que l’attitude du Sous-préfet a été hâtive. Il s’est précipité à exécuter les décisions prétendument venues de Zurich. Or, à la lecture minutieuse de cette prétendue lettre qui semble indiquer qu’il y a une concertation ou alors il y a eu une rencontre entre les responsables de la Caf et la Fifa, de laquelle est sortie cette lettre, on ne la perçoit pas. On aurait dû avoir affaire à un compte rendu d’une session extraordinaire des officiels de la Caf et de la Fifa pour se prononcer sur la question du Cameroun. Or, il n’en est rien. Dans la rédaction il y a une multitude d’incongruités qui laisse croire que c’est des gens tapis dans l’ombre sur le triangle national camerounais qui sont auteurs de cette correspondance. Leur jargon est reconnu dans cette correspondance.

Les auteurs de la correspondance disent agir en interprétation de la sentence du Tas…

Le jeu devient intéressant, parce qu’en réalité, on aurait dû à l’occasion de cette prétendue lettre qui n’émane pas de la Fifa, y déceler une décision de la Caf ou de la Fifa, qui confirmerait de leur point de vue ce que la sentence aurait dit ; une décision qui maintiendrait ces personnes-là conformément à la sentence du Tas. Or, il n’en est rien à ce jour. Il n’y a aucune décision de la Caf que quelqu’un peut exciper, aucune décision de la Fifa qui peut être excipée en la matière. Aujourd’hui, le secrétaire général de la Caf ; le secrétaire général de la Fifa, arrive à venir interpréter les paragraphes d’une sentence arbitrale, c’est tout ce qu’il y a de plus ignoble dans le monde de la justice. On sait exactement, pour ceux qui doivent exécuter une décision de justice, tout ce qui est opposable aux tiers et à la partie succombante. C’est dans le dispositif d’une sentence que le juge ou l’arbitre commis à la tâche dit exactement quelle est la conclusion qu’il est parvenue, eu égard à la discussion qui s’est tenue, qu’il a pu transcrire dans l’exposé des motifs. Cet esprit de vouloir nous exciper les paragraphes 233 à 235, n’est que la maladresse de ceux qui sont à Tsinga, qui sont incapables de comprendre à quoi correspond une sentence arbitrale, une décision de justice, ça ne peut pas être du fait de la Caf ou de la Fifa.

Cette correspondance fait état de ce que si cette Assemblée générale ne se tient pas ou si les textes ne sont pas adoptés, le cas Cameroun sera porté auprès des instances de la Fifa, pour sanction. N’est-ce pas une menace ?

Il faut pouvoir noter que, c’est dans ce paragraphe qu’on retrouve le caractère puéril des gens qui ont rédigé cette correspondance. A la Caf où il y a le secrétaire général qui a été à la tête des associations sportives à la Fifa. Il sait exactement comment ça fonctionne, parce que lorsqu’on parle d’ingérence, il n’y a pas que celle des pouvoirs publics dans une nation. Il y a également l’ingérence des instances faîtières. Il y a une limite d’action de la Caf ou de la Fifa dans les affaires internes des associations sportives, et tout le monde sait qu’une association sportive de quelque niveau qu’elle soit n’a pour organe suprême que son Assemblée générale. Il est donc hors de question que Mosengo ; Fatma et les commanditaires de cette correspondance, puissent donner l’impression de menacer ou de rendre leur Assemblée générale constituante, des caisses d’enregistrement. Selon eux, selon ce paragraphe, ce n’est qu’une formalité pour donner l’impression aux gens qu’ils se sont réunis pour adopter. Il n’y a pas d’adoption qui soit. Il était juste question qu’ils se retrouvent dans une salle, qu’on imprime les textes ; ils ressortent. Pour dire que ce qu’ils ont préparé, c’est ce qui doit passer. Ce n’est pas vrai, ça ne fonctionne jamais comme ça nulle part.

Dans cette lettre, il y a aussi une menace sur la Can. N’est-ce pas un chantage ?

Au-delà du chantage, c’est d’une forme d’infantilisation du peuple camerounais. Tous les efforts qui ont été engagés pour préparer cette compétition l’ont été du fait du peuple camerounais. Ce chantage ne peut pas prospérer. Ce chantage est doublé d’une ingérence dans les affaire interne de la Fécafoot.

Propos recueillis par A.C

Achille Chountsa

Author: Achille Chountsa

Passionné de sports et du travail bien fait

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