Jusqu’à hier, 8 février 2023, au moment où nous allions sous presse, l’application numérique Yango était toujours opérationnelle. « Je viens de contacter un taxi Yango. J’ai mis Tsinga sur mon téléphone. On a signalé qu’il y a une voiture à proximité, à une minute de moi. J’ai vu dans le Gps que la voiture est dans le centre. Le temps que le chauffeur décide de m’appeler j’ai annulé la commande », précise Edwige N. une jeune dame, habituée à ce mode de transport. Yango est une plateforme numérique à travers laquelle il est possible de commander des véhicules à usage commercial, à partir d’un téléphone Android où l’on a installé l’application.
Cette application est opérationnelle dans les grandes villes du Cameroun depuis le 15 novembre 2021. Et depuis le 6 février dernier, une décision forte a été prise par Jean Ernest Masséna Ngallè Bibéhè, le ministre des Transports : « A l’issue d’une mise en demeure adressée aux opérateurs de la plateforme numérique Yango et des réunions d’évaluation tenue au ministère des Transports, l’activités de transport public de personnes opérée via la plateforme numérique Yango sont suspendues jusqu’à leur mise aux normes, conformément aux dispositions de la loi n°2001- 015 du 23 juillet 2001 régissant les professions de transporteur routier et auxiliaires de transports routiers ». L’article 5 alinéa 1 de ladite loi dispose : « L’accès à la profession de transporteur routier est subordonné à l’obtention d’une licence délivrée par le ministre chargé des Transports ». Licence dont ne dispose par la plateforme numérique Yango. Le ministre des Transports en a profité pour attirer l’attention d’autres transporteurs exerçant dans l’illégalité, de se conformer à la réglementation. « Le ministre des Transports saisit cette occasion pour inviter les transporteurs clandestins en général et ceux voulant opérer à partir des plateformes numériques en particulier, à se conformer sans délais aux dispositions pertinentes du Décret n°2022/8801/PM du 10 octobre 2022 fixant les conditions d’accès aux professions de transporteurs routiers et d’auxiliaires des transports routiers », avise Jean Ernest Masséna Ngallè Bibéhè. Il s’agit, dans le cadre de l’application de ce Décret, et selon le communiqué du ministre des Transports, qui a suivi la décision, de « la licence spéciale S10 pour le service de transport par taxi de personnes opéré via les plateformes numériques ».
Tollé chez les usagers de Yango
Les syndicalistes peuvent se frotter les mains à la suite de cette décision. Eux, qui ont toujours estimé que Yango leur faisait une concurrence déloyale. Tollé par contre chez les usagers et clients de Yango. « On était en sécurité avec Yango et c’était moins cher », regrette une jeune dame. Emmanuelle K. est une cliente régulière. « Suspendre Yango dans notre contexte social actuel, où l’on se fait agresser à tout de bout de champ dans les taxis ; un contexte d’insécurité permanent reviendrait à livrer les citoyens, surtout les femmes à nos bourreaux », déplore-telle. Et d’expliquer : « L’application Yango nous permet non seulement d’avoir un accès rapide à taxi, se déplacer à moindre coût. Mais surtout en sécurité. On peut mettre l’accent sur la sécurité car les usagers que nous sommes avions la possibilité de savoir qui est notre chauffeur, d’avoir sa plaque d’immatriculation et son numéro de téléphone. Yango est dès lors devenu indispensable pour les citoyens ». Et d’ajouter : « Il est clair que nous empruntons des taxis sans savoir qui est notre chauffeur et qui sont les passagers et ensuite tout le monde n’a pas les moyens de s’offrir un véhicule. Suite à la hausse des prix de certaines denrées sur le marché, il est clair que le banditisme va prendre son envol au Cameroun et si l’on ne peut plus être en sécurité en empruntant Yango, il ne nous reste qu’à prier et espérer tomber sur un bon taxi », avoue-t-elle. Il ne s’agit que d’une suspension qui peut être levée, si le promoteur de la plateforme numérique Yango se conforme à la réglementation en vigueur, notamment la loi et le Décret susmentionnés.