Transport urbain : Les chauffeurs de taxi dictent leur loi à Yaoundé

Depuis le lundi 13 février 2023, ces conducteurs veillent à l’application des nouveaux tarifs malgré le désarroi des usagers.  Pourtant, la note officielle du gouvernement reste attendue.
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Debout au lieu-dit Mobil Elig-Essono, Honorine marmonne : « plus d’une heure de temps à stopper le taxi. Les pieds me font déjà mal. Ils refusent mes 150 Fcfa ou quoi ? » La jeune dame se rend à la Mobil Omnisports. Quelques minutes plus tard, deux jeunes hommes près d’elle proposent 500 Fcfa, deux places Mobil Omnisports. Le taximan klaxonne en signe d’acquiescement et ils embarquent. « Je ne débourserai pas plus de 150 Fcfa. Je comprends maintenant pourquoi personne ne veut me porter », s’écrie Honorine. Un véhicule de transport en commun s’immobilise près d’elle. « Soa, Eleveur, Mobil Omnisports ». « Mobil Omnisports c’est combien ? », interroge-t-elle. « Ce n’est plus 100 Fcfa. C’est désormais 150 Fcfa», précise le convoyeur. Visiblement soulagée, elle se faufile dans le car. La scène interpelle plus d’une personne en ce lieu. « Depuis ce matin, les taximen se conduisent comme des petits rois. Non seulement il faut payer 300 Fcfa mais en plus, ils exigent d’avoir les pièces de monnaie », lance un usager.

Plus loin, au lieu-dit Fokou Emana, hier dans la matinée, une jeune dame stoppe le taxi. Elle propose 300 Fcfa pour le ministère des Finances. « Ma chérie, tu vas dormir là. Tu es arrivée en ville aujourd’hui », lui lance un conducteur de taxi.  « C’est petit », lui dit un autre. « Vous pensez que nous même nous voyons du bien », rétorque-t-elle. Sous un soleil ardent, l’attente se fait longue. Elle est obligée de proposer 400 Fcfa pour se faire conduire à sa destination.

Les usagers aux abois

Depuis quelques jours, les usagers vivent le calvaire à la suite de la hausse des prix du carburant. Si quelques-uns hésitaient à se conformer aux nouveaux tarifs, depuis le lundi 13 février, ils se sont arrimés à la nouvelle donne et n’hésitent pas à dicter leur loi. Certains usagers l’ont constaté lors des remboursements. Palais de justice, un client descend du taxi. Ce dernier qui a remis un billet de 1000 Fcfa se voit rembourser 700 Fcfa. « Je n’ai pas proposé 300 chauffeur », s’exclame-t-il. Le chauffeur répond : « le taxi c’est désormais 300 F le père ». « Comment ça ? », rétorque-t-il la main tendue vers le taximan qui démarre en trombe.

Les usagers se disent assiégés de toutes parts avec la conjoncture économique actuelle.  « Depuis que le prix du carburant a augmenté, nous souffrons. Les tarifs du taxi sont passés automatiquement de 250 à 300 Fcfa. C’est asphyxier les Camerounais », s’indigne Yvanna Nke.  Et d’ajouter : « Nous avons déjà des difficultés financières si tout doit augmenter même le transport, c’est un véritable problème. Nous sommes du secteur privé, la hausse des salaires ne nous concerne pas ».

Chacun y va de sa plainte. « Les 50 Fcfa là sont énormes. Imaginez-vous la dépense supplémentaire en un mois si vous aviez l’habitude de dépenser 1000 Fcfa par jour pour le transport. Nous sommes fatigués de la hausse des prix. Pourtant, les conditions de vie ne changent pas. C’est de trop. Les 50 Fcfa servaient à résoudre un autre problème », indique Antoine Mvogo, commerçant. Mariam Hadji évoque un problème d’équité. « Les agents du service public ont connu une augmentation de salaire, et nous alors qui sommes dans le secteur privé. Qu’en est-il ? Mais, nous sommes tous appelés à payer le même tarif », indique la jeune femme. Charles Otomo, étudiant, n’a pas vu son argent de poche augmenter. « L’argent de transport est resté le même. C’est à moi de développer des astuces pour finir les semaines. Je suis obligé de faire une partie du chemin à pied pour essayer de prendre le taxi à 250 Fcfa. Je le fais aller et retour, mais c’est pénible et fatiguant ».

« Avec le carburant de 12 000 Fcfa, je travaillais toute la journée. Depuis l’augmentation du prix du carburant, je suis passé à 14 500 Fcfa. Comment je fais pour avoir la recette ? Le bénéfice ? Les clients n’ont manifesté aucune compassion à notre égard. Je suis sans pitié pour eux. Désormais, c’est 300 Fcfa ou rien et 350 Fcfa dans la nuit. Je tolèrerai les 100 Fcfa sur les courtes distances justes pour avoir la monnaie », explique un taximan. Il prévient : « il faudra avoir les pièces pour espérer trouver un taxi. »

Les mototaxis aussi

Les conducteurs de moto se sont également inscrits dans le registre de l’augmentation des prix. « Vous voulez qu’on fasse comment ? Tout le monde augmente, nous aussi on doit vivre. Est-ce que c’est de l’eau qu’on met dans les réservoirs. C’est du carburant », explique Anicet Noa, conducteur de moto. « Je paye désormais 150 Fcfa. À plus de 21 h, c’est 200 Fcfa.  Tu es obligé de payer pour arriver en sécurité chez toi », se lamente un usager. « Nous sommes obligés de nous aligner puisque tous les conducteurs de moto se sont mis d’accord sur les prix. Tous les tarifs ont augmenté de 50 Fcfa. Ceux qui payaient 200 donnent désormais 250, 300 c’est 350 Fcfa et ainsi de suite », ajoute-t-il. Tout près de lui, Achille aussi se plaint. « Est-ce que nous travaillons tous dans le public pour dire que les salaires ont augmenté. Ce n’est pas juste. Nous avons débuté l’année avec trop de hausse des prix. Même les mototaxis s’en mêlent. Je suis obligé de payer 250 Fcfa pour arriver chez moi. C’est catastrophique ».

Pour les véhicules de transport en commun desservant la banlieue de Soa et le centre-ville, les chauffeurs ont opté pour des distances courtes (Total Ngousso, Eleveur) au prix de 250 Fcfa. Concernant le transport périurbain, le tarif n’a pas connu de hausse jusqu’ici.

La décision d’augmenter le prix du transport urbain a été validée le 7 février dernier au cours de la rencontre entre le gouvernement et les syndicalistes des chauffeurs du transport routier. Il a été décidé à cet effet que le tarif du transport par taxi passera de 250 à 300 Fcfa en journée et de 300 à 350 Fcfa pour le ramassage de la nuit. On a enregistré dans certains quartiers de vives alternations. La communication du gouvernement sur l’augmentation du prix du taxi reste attendue.

Cecile Ambatinda


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