Voilà bientôt 10 ans que Michel Thierry Atangana a quitté les geôles du Secrétariat d’Etat à la Défense (SED) à Yaoundé. Ce sont également pour lui, 10 ans d’attente de réhabilitation. Englué avec lui dans une interminable bataille judiciaire, l’un de ses avocats en France, Me Stéphanie Legrand s’accroche à l’idée d’un décret que doit prendre le président de la République du Cameroun, pour espérer un terme à ce drame qui dure depuis son arrestation en 1997.
En effet, l’avocate a proposé fin 2022 qu’un décret soit pris par le Président Paul Biya actant sa décision de régler définitivement les différents volets du dossier, à savoir la réhabilitation de Michel Thierry Atangana et les aspects financiers, afin d’arrêter le cours des intérêts, puis l’établissement par le Cameroun, d’une lettre d’intention adressée aux autorités françaises pour bénéficier des garanties lui permettant de lever dans de meilleures conditions des fonds sur les marchés financiers. Ce montage éviterait au contribuable camerounais de payer brutalement le lourd tribut dans une affaire fabriquée par des individus et rassurerait de potentiels investisseurs quant à la capacité du Cameroun de reconnaitre ses erreurs dans une affaire purement commerciale et accompagner les victimes des mauvais choix de certains fonctionnaires sur place, dans le processus de réparation.
Sa conviction dans cette démarche, Me Stéphanie Legrand la fonde dans les multiples contacts récents établis entre l’Elysée, le palais d’Etoudi, le quai d’Orsay et des rencontres faites par le musicien Jacques Greg Belobo, sur l’initiative de Paris, auprès de l’Ambassadeur de France à Yaoundé et autres autorités locales. Les retours ont généralement été positifs. En guise d’illustration, récemment Catherine Colonna, ministre français des affaires étrangères a encouragé, par courrier, Michel Thierry Atangana à poursuivre ses démarches auprès des autorités camerounaises en vue d’obtenir sa réhabilitation et l’indemnisation des préjudices subis.
Légalité des indemnisations
Notons qu’en amont, Le 22 novembre 2013, le Groupe de travail de l’ONU juge que Michel Atangana, prisonnier politique, a été victime d’arrestation et détention arbitraires, en violation de la Convention universelle des droits de l’Homme. Il demande la libération immédiate de Michel Atangana, la sanction des personnes responsables et l’indemnisation des préjudices subis par lui du fait de sa privation de liberté depuis 1997 (résolution n° 38/2013). La décision est rendue après un long travail d’enquête.
La Cour européenne des droits de l’Homme a reconnu au Groupe de travail, selon ses textes fondateurs « instance dont la procédure est contradictoire et dont les décisions sont motivées », dont les « recommandations (…) permettent de déterminer les responsabilités étatiques (…), voire de mettre fin aux situations litigieuses » la qualité d’«instance internationale d’enquête ou de règlement ». Ce qui est, avec d’autres décision de justice, le socle de la légalité des indemnisations pour lesquelles autorités françaises et camerounaises sont d’accord pour le principe.
Depuis lors, le Cameroun a suivi, dans sa dimension pénale la ligne du groupe de travail des Nations Unies. Et si le pays reconnait la pertinence du règlement des aspects civils, la concrétisation des promesses de la plus haute autorité de l’Etat reste attendue.