« L’Éducation est la meilleure arme pour changer le monde », disait Nelson Mandela. Depuis de nombreuses années, l’éducation mondiale est en crise. Selon le secrétaire général des Nations unies, cette crise touche les problèmes de vision de l’éducation et d’objectifs d’apprentissages, de qualité de recrutement, de formation, de rémunération et de gestion des carrières d’enseignants, ainsi que ceux de méthodes et d’outils pédagogiques mis à la disposition de ces derniers.
Le milieu éducatif au Cameroun est marqué par de multiples revendications des seigneurs de la craie. Au courant de l’année scolaire 2021/2022, des grèves ont été observées par ces pédagogues pour réclamer de meilleures conditions de vie et de travail. En ce début d’année, des voix sous la bannière des mouvements (On a trop supporté (Ots) ; On a trop attendu (Ota) et des syndicats se sont une nouvelle fois faites entendre pour exiger l’implémentation des mesures annoncées par le gouvernement. Pas plus tard que le 01 octobre dernier, l’intersyndicale a informé qu’une série de débrayages prendra effet dès le 15 octobre face à ce qu’elle qualifie de mutisme du gouvernement. « La transformation de l’éducation commence avec les enseignants ». C’est cette thématique qui guide les activités liées à la célébration ce 05 octobre de la Journée mondiale des enseignants (Jme). Selon le Syndicat national autonome de l’enseignement secondaire (Snaes), pour rendre concret ce thème, le gouvernement camerounais doit apprendre à « permettre aux enseignants de se transformer et de devenir des agents de changement pour remplir leurs rôles essentiels » dans le système éducatif futur.
Permettre aux enseignants de se transformer et de devenir des agents de changement pour remplir leurs rôles essentiels
Pour ce faire, il est temps de de sortir des paradigmes des états généraux de 1995 marqués par les lois d’orientation de l’éducation de 1998 et 2001 pour entrer dans ceux du 21e siècle et permettre aux enseignants de jouer pleinement le rôle qui est le leur dans la formulation des nouvelles politiques éducatives attendues et qui touchent en premier lieu à leur profession. Dans la même lancée, des activités se tiennent dans les établissements pour sensibiliser les enseignants sur leur rôle. « J’ai animé lundi, une conférence portant sur : « L’enseignant, modèle de transformation de l’élève à travers l’école ». C’était l’occasion de montrer et de démontrer que l’enseignant aujourd’hui occupe dans la transformation de l’élève, une place importante dont il existe peu d’équivalents. L’éducation c’est la maison, l’école, l’enseignant et l’État. Et dans cette chaîne, l’enseignant occupe parfois la place de parent de substitution pour le réel parent qui traverse la vie en courant. Il occupe aussi une place laissée vacante par l’Ecole souvent débordée et ne remplissant pas toutes les conditions d’un réel épanouissement. Par l’État qui n’a pas toujours les moyens de satisfaire toutes les exigences de cette école qui n’a parfois pas de bancs ni de salle de classe », confie Christian Etoundi, enseignant. « C’est dans la mélancolie que nous travaillons à la veille de la célébration qui nous est dédiée. L’enseignant camerounais se trouve dans une situation précaire. Fêter le 05 octobre devient donc inutile pour plusieurs d’entre nous. Seuls les peureux de la hiérarchie iront défiler. Personne n’ira là-bas parce qu’il est fier d’être enseignant », déclare Daniel Waye, instituteur à l’Ecole publique d’application de Zokok à Maroua. Il ajoute : « Aucun enseignant au Cameroun n’est à jour dans son salaire : soit il n’a pas encore ses avancements, ses allocations familiales, la prime de non logement, telle prime qui manque, et pour obtenir quoi que ce soit, des réseaux mafieux sont installés dans les ministères avec des ramifications partout dans l’arrière-pays, il faut céder 15 voire 40% du montant pour bénéficier de ce qui te revient ». Romain par contre demande de surseoir les revendications le temps d’une journée afin de donner à cette célébration toute sa coloration. « Bien que les doléances faites par les enseignants soient encore à la traine, ils doivent mettre un tant soit peu leur mécontentement de côté pour célébrer cette journée comme il se doit.
Seuls les peureux de la hiérarchie iront défiler. Personne n’ira là-bas parce qu’il est fier d’être enseignant
Malgré tout, l’enseignant est un éducateur, un modèle. C’est l’occasion de revoir nos méthodes d’enseignement, de mettre sur place des stratégies pour jouer le rôle qui est le nôtre conformément au thème de cette édition », pense-t-il. Pour Roger Kaffo, secrétaire général du Snaes, il n’est pas question de célébrer mais de sensibiliser les enseignants sur les enjeux des actions en cours. « Les enseignants s’organisent pour marquer cette journée et en profiter pour évaluer la mise en œuvre de la recommandation sur la condition de l’enseignant de 1966 pour la base et le secondaire, et de 1994 pour l’enseignement supérieur », déclare-t-il. Dans la même veine, Christian Etoundi estime que : « le 05 octobre en lui-même est une journée de réflexion sur la condition de l’enseignant et je crois que l’occasion sera belle pour ceux-là qui transforment notre société à travers l’élève de s’affirmer par l’interpellation des pouvoirs publics ».