Quatre militaires en service au 31ème bataillon d’infanterie motorisé de Tcholliré dans la région du Nord ont été placés en détention provisoire à la prison de Garoua le 2 juin 2022. Cette information a été publiée par l’Ong Mandela Center international. Une source dans les services du gouverneur de la région du Nord confirme effectivement que les quatre militaires comparaîtront le moment venu devant le tribunal militaire de Garoua pour soupçon de meurtre d’un jeune éleveur.
L’Ong Mandela International a rendu public le 29 mai dernier une information sur l’exécution extrajudiciaire, arbitraire et sommaire d’un jeune éleveur par les éléments du 31ème bataillon d’infanterie motorisé (Bim) de Tcholliré dans la région du Nord Cameroun. Les faits se sont déroulés le 28 avril 2022 près du village Loubol, à la frontière entre le Cameroun et la République centrafricaine. La victime n’est autre qu’un certain Souleymanou Bouba, né le 14 mars 2000, ex- élève en classe de 3ème espagnol au collège d’enseignement secondaire de Touboro.
Coup de feu mortel
Ce jour-là, la victime revenait en compagnie de ses camarades d’une transhumance de deux mois en Rca. Dans son rapport d’enquête publié suite à une mission effectuée dans la localité, Mandela center international retrace l’origine du drame : « Qu’une fois arrivés au niveau de la frontière où se trouvent habituellement les éléments des forces de défense et de sécurité camerounaises, les éleveurs ont traversé la frontière en absence des éléments du bataillon d’intervention motorisé qui se postent sur le couloir de transhumance internationale pour percevoir illégalement 100.000FCfa par troupeau, tant à l’entrée qu’à la sortie du pays. A leur retour au poste, les militaires ayant remarqué le passage des animaux, se sont renseignés de la direction prise par les éleveurs auprès des agriculteurs travaillant dans les environs. Ces soldats ont été accompagnés par deux agriculteurs jusqu’à rattraper les éleveurs et leur troupeau après 30 mn de marche. Malheureusement, sans aucune sommation, les militaires ont interprété le passage de la frontière en leur absence comme étant du mépris à leur égard. Ils ont immédiatement ouvert le feu qui a atteint mortellement Souleymanou Bouba ».
Pris de panique en entendant les détonations, les deux autres éleveurs qui étaient avec la victime ont pris la fuite en abandonnant leur troupeau.
Revenus sur les lieux le lendemain, ils trouveront le corps de leur camarade gisant dans une mare de sang avec une balle logée en pleine poitrine. Les deux éleveurs qui se sont échappés ont été auditionnés le 30 avril à la brigade de gendarmerie de Malboum ainsi que le père de la victime. Les militaires ont nié les faits pendant leur audition dans la même unité.
Plainte de la famille
Dans le rapport d’enquête rendu public, Mandela Center international affirme que le commandant de la brigade territoriale de Malboum, responsable de l’enquête, a déclaré que selon les informations en sa possession quatre militaires ont été identifiés comme auteurs de cet assassinat. Ce cas de meurtre viole l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui dispose : « Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie. »
Jean Fogno, le secrétaire exécutif de l’Ong Mandela Center affirme qu’une plainte de la famille a été déposée au tribunal militaire pour meurtre présumé et violation de consignes contre les quatre militaires.
Le tribunal militaire de Garoua et le ministère de la défense ont été saisis pour clarifier cette situation. Le 31 janvier 2022, le décès d’un jeune homme survenu au lamidat de Garoua avait défrayé la chronique dans le grand Nord. Le jeune avait été retrouvé mort le 31 janvier et il avait été vite enterré sans que les autorités judiciaires et administratives ne sachent exactement ce qui avait provoqué cette mort suspecte. Le 3 février le corps de la victime avait été exhumé. L’autopsie avait révélé que la victime était morte des suites de tortures.