
Le nouveau recteur a décidé que pour retrouver les franchises universitaires, l’« Uv-G », selon une terminologie consacrée dans les campus universitaires au Cameroun, doit se trouver un refuge hors de tous ses campus.
Changement d’homme, changement de pratiques ! Un nouvel air souffle sur le campus de la plus vieille des universités publiques, depuis que le Pr Rémy Magloire Etoua a pris la place de Maurice Aurélien Sosso. En attendant les directives qui sortiront de la tournée de prise de contact qu’il vient de boucler dans les institutions dépendant de l’Université de Yaoundé 1, il a énoncé, le 12 juin dernier, un train de mesures visant à encadrer les soutenances de thèses et de mémoires dans sa structure. Des mesures saluées pour une bonne frange de la communauté universitaire, qui se plaignait sans être écoutée, de la disparition des franchises universitaires, au profit du folklore et de la théâtralisation. Du coup, il met fin à « un ensemble de pratiques non universitaires donnant lieu à la mobilisation d’importantes sommes d’argent au détriment des candidats, et partant de leurs parents ».
La première concerne la décoration des salles de soutenance, dont la fréquence entraînait d’ailleurs la détérioration des édifices publics et des installations pédagogiques. Ensuite, le monnayage de certains services dus aux candidats de même que l’échange des présents entre candidats et membres du jury. Plus grave, les « agapes diverses et autres beuveries parfois servies dans les salles de cours, les amphithéâtres, les bureaux et autres locaux administratifs ». Le recteur est convaincu que « ces pratiques (…) n’honorent pas l’Université et (…) ne sont pas de nature à garantir l’orthodoxie et l’impartialité des jurys commis à l’évaluation des thèses et mémoires ». Par conséquent, les doyens et directeurs d’écoles rattachées doivent y mettre fin. Ils doivent surtout « veiller à ce que de tels actes n’aient plus lieu dans tous les campus de l’Université de Yaoundé 1 ».
Une gangrène nationale
Cette interdiction devrait trouver un écho favorable dans toutes les autres universités, où des fois, les étudiants louent même la salle dédiée à la soutenance. Encore que la soutenance n’est pas une fête. « A notre époque, les étudiants soutenaient dans des conditions suffisamment modestes, généralement en l’absence des membres de la famille, qui ne s’ennuyaient pas de venir écouter des discours ésotériques. Cela empêchait que des gens qui ne comprennent rien à la science gardent des rancunes inutiles aux membres du jury, qui ne font que leur travail. (…) La dernière soutenance à laquelle j’ai assisté dans cette université était plus bruyante que le mariage d’une ancienne prostituée », commente un professeur « exilé », étudiant de la fin des années 80, qui s’est retrouvé ces jours au campus de Ngoa Ekelle dans le cadre de l’hommage rendu au Pr. Ambroise Kom.
En rappel, les marchandages autour des soutenances ont poussé le gouvernement à suspendre les recrutements au cycle de doctorat pour l’année académique 2023/2024. Face à ce que Jacques Fame Ndongo a appelé la mauvaise soutenabilité financière du coût de formation dans ce cycle d’études, les recteurs des universités d’Etat ont été instruits, sur prescription du Premier ministre, de mettre fin au phénomène du préfinancement des soutenances par les étudiants. Le Minesup les avait sommé d’avoir à lui présenter dans un délai d’un mois, la capacité d’encadrement en cycle doctoral de chaque institution, le coût de la tenue des jurys de soutenance de thèse ; les informations relatives à la prise en charge des dépenses liées à l’encadrement et la tenue des jurys sur les trois dernières années, en précisant les dettes éventuelles ; les pièces justificatives des prises en charge du paiement effectif des prestations d’encadrement et de soutenance des thèses pour la même période pour l’ensemble des établissements et écoles doctorales relevant de leur institution ; et surtout justifier de l’existence des lignes budgétaires dédiées à la prise en charge desdites activités.
Le phénomène du préfinancement des soutenances par les candidats a fait grand bruit. Alors que des enseignants de rang magistral, qui en bénéficient, témoignaient honteusement de l’inexistence du phénomène, des étudiants avançaient des montants standardisés et dissertaient sur le mode opératoire, selon les universités concernées. Le problème semble avoir trouvé une solution : dans le calendrier académique 2024/2025, Fame Ndongo fixe au 4 novembre 2024, la date des préinscriptions, sélections et inscriptions pour les étudiants de Master 2 et de doctorat/PhD.