
De nombreux citoyens, estimant leurs voix trahies, ont pris d’assaut les artères de la cité universitaire pour dénoncer des manipulations présumées des résultats de la présidentielle du 12 octobre 2025, incendiant les édifices publics mercredi dernier.
Trois camions municipaux incendiés, une aile du palais de justice endommagée, la maison du parti au pouvoir saccagée et une partie du domicile du recteur de l’Université de Dschang réduite en cendres. Tel est le bilan provisoire de la violente manifestation qui a secoué la ville universitaire de Dschang, mercredi 15 octobre 2025. Des jeunes conducteurs de moto et les autres citoyens de la ville universitaire sont sortis manifester leur mécontentement à la suite de l’annonce de la falsification présumée des résultats électoraux. Un constat fait par Salifou Nsangou, départemental du Front pour le salut national du Cameroun (Fsnc).
Tout serait parti d’un message publié dans la matinée par cet homme politique, membre de la commission départementale de supervision, chargée de la compilation des votes dans la Menoua. Dans cette déclaration adressée aux populations de Dschang et de la Menoua, le responsable politique affirme avoir constaté « un écart considérable entre les résultats sortis des urnes et ceux compilés », évoquant des « falsifications massives des procès-verbaux ».
« Alors que le décompte réel plaçait notre candidat largement en tête, le procès-verbal qu’on nous soumet mentionne désormais soit une victoire réduite, soit une prétendue victoire du candidat Biya », écrit-il. Il y dénonce également le refus de la Commission de prendre en compte ses contestations, l’invitant à se tourner vers le contentieux post-électoral, une procédure qu’il juge inefficace.
« Je prends mes responsabilités devant vous : je préfère vous informer dès à présent et réaffirmer solennellement ma promesse — je ne vous trahirai jamais », conclut-il. Quelques heures après la diffusion de ce message, des rassemblements spontanés ont éclaté dans la ville. Les manifestants, majoritairement des jeunes, ont pris d’assaut les principales artères de Dschang pour exiger la transparence et la publication des véritables procès-verbaux du scrutin.
La colère populaire a rapidement dégénéré. Trois camions de la commune ont été incendiés dans l’enceinte du garage municipal. Le palais de justice a été attaqué, et une partie du dôme du bâtiment a pris feu après des jets de pierres et de cocktails improvisés. Le siège local du parti au pouvoir a également été ravagé, tandis qu’une section du domicile du recteur de l’Université de Dschang, par ailleurs président de la commission communale de campagne du Rdpc de Dschang a été incendiée par des manifestants. « Les jeunes disaient qu’ils en ont assez des tricheries », témoigne un commerçant, encore sous le choc.
Alertées, les forces de maintien de l’ordre, venues de Bafoussam, sous la conduite du Colonel Abba Saïdou, commandant de la légion de gendarmerie de l’Ouest ont été déployées en urgence dans la ville. « Nous avons reçu des ordres stricts pour rétablir le calme sans faire usage excessif de la force », confie un agent de police sous couvert d’anonymat.
Tard dans la nuit, le calme est revenu progressivement dans la ville de Dschang. Mais la tension restait palpable dans plusieurs quartiers de la ville. Plusieurs manifestants ont été interpellés et placés en garde à vue. « Ce qui s’est passé à Dschang est symptomatique d’une rupture de confiance entre les citoyens et les institutions électorales », analyse un enseignant de science politique à l’Université de Dschang. « Les autorités doivent réagir vite pour restaurer la sérénité », a-t-il conseillé.